Le vendeur de glace ( Sélène )

Il commençait à se faire tard. Les groupes de jeunes avaient remplacés les familles, les lumières s'était allumées. Dans un coin de la rue, un vendeur de glace rangeait son chariot, prêt à repartir.

Cela faisait 3 mois déja, et pour lui, c'est comme si rien n'avait changé. Il reconnaissait tout dans les moindres détails, mais lui, personne ne le reconnaissait.
Il avait changé du tout au tout. D'attitude comme d'allure et d'habits. Il s'était teind les cheveux et mis des lentilles, ses yeux bleus glaciers étant une partie trop reconnaissable de son ancienne vie. Oh il n'était pas toujours comme ça. La majeure partie du temps, même, il vivait comme avant, si ce n'est de façon beaucoup plus prudente et sous un pseudo. Mais pour le ranch, il avait fallu faire quelque chose.

Dorénavant, il avait les cheveux bruns, légèrement plus longs, les yeux verts légèrement foncés, et une barbe naissante qui lui dévorait les joues. Il était vêtu d'une chemise blanche ample légèrement échancrée au col et d'un jean clair un peu déchiré au genoux et à l'extrémitée de l'ourlet.
Bref, une allure qu'on aurait put résumé en un mot : artiste.
Le tout complété par une ancienne paire de lunette noires et fines, et un paquet de pop corn qu'il avait acheté au coin de la rue.

Il ne savait pas vraiment pourquoi il était revenu ici. Sa présence n'était plus dangereuse pour personne, mais il était sensé être mort a cet endroit, alors si quelqu'un le découvrait, cela paraitrait louche, et il faudrait qu'il disparaisse à nouveau.
De ce fait, il évitait soigneusement tout les pensionnaires du ranch qu'il croisait. Et jusqu'a ce jour, il y en a qu'un seule qu'il n'avait pas vue, et c'était précisément celle qu'il voulait voir.
A ses côté, allongée dans l'herbe se trouvait Sultane. Elle aussi avait eu quelques changements. On l'avait teinte en noire, raccourci légèrement les poils et corrigé la position, et fait comprendre qu'elle ne devait reconnaitre personne. Et puis surtout, elle ne devait plus montrer autant de complicité envers Mikael.

A présent tout du moins, ils étaient Eric Domet et Polka.

Mikael s'était assis sur un petit muret, grignotant de temps à autre un pop corn en regardant les petits groupes de jeunes autour de lui. Il en connaissait la grande moitié, pour les avoir repérés dans la boite de nuit ou a différents endroits.
C'est alors que Sultane, enfin Polka, releva la tête et huma l'air d'un air intéressé. Mikael, lui, entendit un cri qui venait de derrière lui. La rue executant une épingle à cheveux quelques mètres plus loin, d'autres personnes pouvaient se trouver juste derrière lui, derrière le monticule de fleurs. Il s'avança discrètement derrière ces plantes pour voir ce qu'il se passait, suivit de prêt par Sultane.

L'air chaud et doux de la nuit étant promesse d'une agréable promenable, Sélène avait décidé de sortir de sa tanière et de mettre un peu le nez dehors. L'idée d'ammener Andy avec elle lui avait traversé l'esprit mais elle n'avait pût se résoudre à réveiller son compagnon qui sommeillait paisiblement sur la moquette.

En temps normal, elle ne serait jamais sortit sans un garde du corps, mais en cette magnifique soirée, elle n'avait pas eût le courage d'apeller sa '' garde personelle''. Qui plus est, personne n'était assez stupide pour tenter quoi que ce soit avec autant de gens autour à son avis.

Ses pas la portèrent jusqu'à la rue des lumières, ce lieux si enchanteur où elle s'était retrouvé tant de fois par le passé. La jeune femme inspira longuement et sourit. La musique de son Ipod envahissant complètement son cerveau, elle n'entendit pas les pas précipités derrière elle. Une main se posa soudain sur son épaule, lui arrachant un cris de terreur. Sélène se retourna, prête à utiliser ses techniques d'auto-défense, mais l'homme qui se tenait devant elle avait la carrure d'une armoire à glace. Innutile de dire que toute résistance semblait innutile.

-Que me voulez-vous ?demanda t-elle d'un ton qui trahissait la nervosité.

- Du calme, bébé, je ne te ferai pas de mal. Je t'ai remarqué tout à l'heure et j'me suis dis que ça pourrait être sympa si toi et moi on pourrait faire connaissance.

-Votre offre est bien appréciée mais je ne suis pas interessée, désolée.

Elle lui tourna le dos et poursuivit le chemin mais l'homme l'aggrippa fermement par l'épaule.

-Je crois qu'on s'est mal comprit ma jolie. Tu viens avec moi.

Son regard dur et froid ne laissait pas place à la plaisanterie. Sélène regardait nerveusement autour d'elle, espérant une aide quelqu'onque, mais le segment de rue où ils se trouvaient était pratiquement désert, à l'exception de quelques jeunes ivres. Aucune aide à portée de main.

-Lâchez-moi immédiatement,lui lança t-elle.

-Sinon quoi ?

Il l'attira contre lui, la plaquant contre son corps de façon si brusque qu'elle en eût le souffle coupé. Une main se posa contre sa bouche mais elle la mordit violaement. Le grand colosse poussa un grognement de douleur et lâcha son emprise juste assez longtemps pour permettre à la jeune femme de pousser un cri et de s'enfuir. Malheureusement pour elle, son poursuivant ne mit pas longtemps à la rattraper. Il la plaqua contre un mur de béton et tenta de l'embrasser mais elle le frappa au visage. L'éclair de rage qui traversa alors le regard de l'homme la fit frissoner.

- J'vais te montrer ce que ça coûte de t'en prendre à plus fort que toi sale petite g*rce.

Mikael vit arriver Sélène dans la rue, marchant avec un air rêveur qui flottait devant ses yeux. En un mot, belle à en mourir. Un triste sourire se dessinait sur les lèvres du jeune homme, très vite suivit d'un froncement de sourcil en voyant une personne visiblement animée de pensées peu amicales aborder la jeune femme. Les secondes suivantes confirmerent sa premiere impression. Il dévala en quelques secondes la pelouse, et sauta souplement a bas du mur, a quelques metre de l'agresseur et de l'agressée. Il prit la tete de l'homme qui se balade tranquillement, regardant autour de lui, puis l'air surpris d'une personne qui voit une connaissance Il s'approcha près du molosse.

- Chaaarles ! Comment va? Ca fait un bail, pas vrai?

Il ne connaissait absoluement pas cet homme, mais si il voulait s'en débarasser sans devoir lutter sérieusement, c'est a dire en un coup, il devrait le prendre par surprise. Il lui mit une claque amicale sur l'épaule.
Il n'avait qu'une envie, lui sauter dessus et lui coller des baffes jusqu'a ce que coma s'en suive pour avoir traité Sélène de la sorte, mais une petite voix lui soufflait que ce n'était pas vraiment un idée lumineuse.

- et la famille? Tu sais que ma frangine vient d'avoir son bac? Et puis la petiote va passer son brevet l'année prochaine, elle est deja stressée dis voir! ... Et toi ?

Il attendis environ deux secondes avant de lui décocher sa plus belle droite dans la machoire L'homme tomba au sol. Il n'avait plus qu'a espérer que le coup avait été assez puissant pour qu'il ne se relève pas.
Sultane était restée en haut du muret, regardant Sélène d'un air amical et curieux.
Mikael secoua sa main en sifflant.

- Waaaouw! C'est pas rien ta machoire!

Sélène observa tour à tour les deux hommes, ébahie. Elle-même n'avait pas vu le coup venir tant il avait soudain et innatendu. Elle se pencha légèrement vers son agresseur, histoire de s'assurer qu'il n'allait pas se relever et lui sauter dessus, puis se tourna vers Mikael.

-Merci beaucoup. Un peu plus et je crois que j'y passais.

* Encore une fois...*

Un frisson lui parcourut l'échine à la pensée de ce souvenir si douloureux de ses seize ans. Elle se ressaisit rapidement et sourit à son sauveur.

-C'était assez étonnant comme attaque, je dois l'avouer, mais apparement tout aussi efficace qu'une myriade de coups.

Son regard détaillait subtilement le jeune homme, s'attardant surtout sur son visage. Il n'était pas très vieux, peut-être un an ou deux de plus qu'elle, et semblait pleinement confiant. Ses yeux brillait d'un éclat qui attirait tout de suite l'attention. Côté vestimentaire, il avait un style plutôt rare mais cependant pas absent de la population qui lui donnait un certain charme.

- Au fait, moi c'est Sélène. Sélène Waydan,se présenta t-elle finalement, coupant court à son analyse.

Mikael Hocha de la tête, un triste éclat dans les yeux. Cela faisait tout de même bizarre qu'elle ne le reconnaisse pas.

* C'est pas ce que tu voulais? Pouvoir la suivre sans qu'elle te reconnaisse, sans lui attirer d'ennui ?*

C'était pourtant une sensation si étrange. Il mourrait d'envie de lui sourire et de lui dire : " quoi? Tu ne me reconnais pas?". Mais c'était un peu dérisoire comme pensée. Il se râcla la gorge, s'appliquant pour ne pas confondre le nom.

- On m'appelle Eric, Eric Domet...

Dans un bruit manquant de légèreté, Sultane descendit du muret. Elle avait adopté très rapidement son rôle de chien joueur, indépendant et pas très délicat. Même si cela collait assez mal avec son comportement d'avant.

- et voila Polka.

La chienne s'approcha de Sélène et lui renifla la main. Mikael se crispa. S'il ne risquait pas de faire de gaffe, Sultane elle pouvait en faire sans s'en rendre compte.
Les petits groupes de la rue s'étaient retournés d'un bloc vers l'homme couché sur le sol, visiblement sonné.

- Je crois que vous devriez déguerpir avant qu'un autre ivrogne vous tombe dessus...

Il venait à peine de la retrouver qu'il la renvoyait déjà ailleurs.
Il aurait put engager une autre conversation. Il savait que tant qu'il serait à côté d'elle et que les agresseurs se limitaient à des jeunes alcoolisé, il n'y avait pas de problème. Sauf s'il tombait sur un gar expérimenté face auquel il devrait montrer un peu plus qu'une droite bien placé. Il soupira légèrement.

* C'est dur de faire semblant ... *

Se rappelant qu'il avait quelque chose à grignoter, Mikael sortit le paquet de pop corn de sa poche et le tendis à la jeune femme.

- pop corn?

Revenue auprès de lui, Sultane lui lançait un regard franc, comme approbateur.

Sélène sourit et hocha la tête.

-Enchantée de vous rencontrer, Éric

Elle se pencha vers Polka et la caressa une fois que la chienne eût terminé de la renifler. Ses doigts fourragèrent un instant dans les courts poils de sa fourrure.

-Un berger allemand, non ? L'un de mes amis en possède également un. Parait-il que ce son des chiens très intelligents et fidèles.

La jeune femme eût alors une pensée pour Sultane, et innévitablement, pour Mikael. Son visage se fit soudain nostalgique sans pour autant devenir triste. Oui, ils se reverraient, ce n'était simplement qu'une question de temps. Elle était prête à attendre cinq ans, comme il l'avait lui-même fait par le passé.

Lorsqu'Éric lui suggéra de quitter les environs, la tirant ainsi de ses pensées, elle ne pût s'empêcher de rire doucement .

- Si vous saviez tous ce que j'ai vécus, vous comprendriez bien vite qu'il faut plus qu'un mec un peu trop ivre pour me faire peur. Et puis, vous êtes là, non ? Je crois qu'après le pain que s'est prit mon très cher ami de tout à l'heure, plus personne ne s'y risquera.

Sélène accepta avec joie le pop-corn qu'on lui tendait et en prit quelque uns, qu'elle savoura lentement, laissant le goût du beurre envahir sa bouche. Elle pencha la tête sur le côté, comme elle avait tant l'habitude de le faire, et soupira d'un air satisfait.

Mikael sourit. Heureus de passer quelques minutes de plus avec elle, même si ce n'était pas sous la forme dont-il voulait.

- Celle ci n'est pas très délicate, et je suppose qu'il y a encore du boulot du côté de la fidélité, mais au final, on s'en sort pas trop mal!

Joignant le geste à la parole, il flatta le cou de la bête qui le regarda avec des yeux aimant, ce qui lui arracha un sourire.
Soudain, il réalisa quelque chose. Trois moi, cela faisait beaucoup de temps. Et tout en regardant fixement Sélène, il pensa qu'elle avait deja eu le temps de se refaire une vie.

- Alors, vous venez d'ou avec votre musique et votre petit air rêveur?

Sultane était remontée sur le muret, si bien qu'elle regardait Sélène de haut, toujours cette étincelle dans les yeux, qui exprimaient étrangemment les retrouvailles. Se crispant légèrement, Mikael lui lança un regard sévère. Celle ci semblait protester en le soutenant quelques instants avant de céder.
Mikael était persuadé que Sultne avait compris, et qu'elle ne lui en voudrait pas pour cet attitude.

Elle passa une main dans sa longue chevelure en souriant.

-Au sens philosophique, je viens de très loins. Au sens simple, du Ranch 4 Saisons. J'y suis pensionnaire depuis un bon moment et de temps à autre, quand l'ennuie me prend, je viens me balader ici pour décompresser.

Sélène réalisa soudain que le jeune homme devant elle était la première personne avait qui elle avait une véritable conversation depuis des mois. La plupart des gens, lorsqu'ils la reconaissaient, se jetaient sur elle pour quémander un autographe, une photo ou toute autre chose à rammener en souvenir. Entre son retour progressif dans le monde de la scène et toutes la paperasses qui s'y rattachait, elle avait bien du mal à socialiser normalement, en tant que madame tout-le-monde.

-Et vous, vous n'êtes pas d'ici, n'est-ce pas ? C'est un petit coin où tout le monde se connaît et je ne vous aie jamais vût.

Conclusion un peu hâtive, soit, mais la jeune femme ne voulait que le faire parler. Sans qu'elle puisse dire pourquoi, il l'intriguait au plus au point, et elle avait l'impression de le connaître, ou du moins, de l'avoir déjà vus par le passé, contrairement à ses dires. Se renseigner sur lui serait donc une bonne façon de mettre le doigt sur la cause de cette impression.

Il eu un soupir d'amusement tout en jetant un regard de côté.

- Et bien, disons que je viens et reviens de loin. C'est assez confus! J'ai voyagé un peu partout, eu des problèmes avec pas mal d'autorité. Ici, les jeunes semblent plus pacifistes qu'ailleurs, ça devrait aller...

Il jeta un regard à l'endroit ou l'agresseur s'était écroulé : il n'y avait plus personne. Il avait du s'eclipser pour réparer sa fierté.

-J'ai entendu parler de ce ranch, il y a des gens de toute envergure la bas! Mais je ne m'y suis pas installé...

Il se passa une main dans les cheveux en souriant.

- Trop de monde, trop de règles ... Je préfère passer la nuit à l'hotel.

Mikael réfléchit un instant si cela ne collait pas trop à sa personnalitée d'antan. Il devait agir à l'opposé, mais faire un grand sourire en disant j'ai organisé une rêve partie, ce n'était vraiment pas lui. Il tenta de détourner le sujet de conversation.

- On ne doit pas souvent vous laisser tranquille dans les rues, non? Vu votre réaction, vous avez quelques bases d'auto défense. Cela entraine donc que ça vous est deja arrivé une paire de fois.

-Malheureusement oui. Normalement, ce type n'aurait pas eût le temps de m'approcher à moins de trois mètres que mes gardes du corp se seraient jeté sur lui. C'est la première fois depuis longtemps que je me ballade seule et il a fallut que je me face attaquer. Peut-être est-ce un signe.

Elle ressera le col de sa veste, sentant un courant d'air froid planer au dessus de sa tête. La température commençait à se rafraîchir, tout en demeurant cependant confortable, et le côté quelque peu frileux de la jeune femme s'en ressentait.

Un couple passa près d'eux, main dans la main, en se lançant des petits regards tendres et Sélène ne pût s'empêcher de les envier. Ce genre de bonheur, elle n'y avait pas encore eût droit. Comme à chaque fois, elle devait patienter, attendre que la chance tourne en sa faveur pour obtenir ce qu'elle voulait. Ses yeux ne quittèrent les deux amoureux que lorsqu'ils disparurent au coin de la rue.

-Vous dites que vous avez eût quelques problèmes avec les autorités et que le ranch était trop réglementé à votre goût, dit-elle en se tournant vers Éric. [b]J'imagine donc que vous n'êtes pas le genre de gars à rester assit toute la journée en se demandant ce qu'il pourrait faire pour rendre sa vie plus palpitante.

Un large sourire fendit le visage de Mikael.

- Pas vraiment non, les choses "palpitantes" savent me trouver, en général.

Même s'il était officiellement mort, il continuait indirectement à diriger le MI6, se servant de Mike comme d'un pantin pour respecter ses choix et prendre les justes décisions. Ce dernier n'avait même pas contesté cet ordre. Théoriquement, Mika étant mort, c'est Mike qui aurait du "reprendre la boutique". Mais celui ci n'avait rien demandé.
Le jeune homme fixa la jeune femme avec un regard interressé, alors que celle ci fixait intensement un couple qui passait lentement dans la même rue.

- C'est votre cas, c'est ça? Mais n'est-ce pas désagréable lorsqu'il arrive trop de choses en même temps?

C'était peut-être vicieux de sa part, mais à travers cet Eric, il voulait en savoir plus sur elle, de toute ces choses qu'elle n'aurait pas confié a Mikael Smenn. En même temps, cela serait comme une trahison.

* Elle vient de croiser un gar dans la rue, c'est pas parce qu'elle t'as adressé deux phrases qu'elle va forcément rester liée à toi*

Elle leva les yeux au ciel et s'adossa contre le muret.

-Vous ne croyez pas si bien dire. Il y a des fois où j'ai l'impression que tout m'échappe, que je ne peux rien contrôler. Une peu comme si j'étais une simple figurante dans ma propre vie, une spectactrice. Les choses se succèdent à toute vitesse dans ma tête et le temps que je réalise ce qui se passe, le temps m'a filé entre les doigts comme du sable. C'est très frustrant ! J'essaie toujours d'améliorer la situation mais à chaque fois, j'obtiens l'effet contraire ! Un peu comme dans un cercle vicieux : Plus j'essaie, plus ça se dégrade, et plus ça se dégrade, plus j'essaie. Je sais que c'est très désespéré comme comportement mais je n'y peux rien, je n'arrive pas à simplement laisser les choses aller en espérant que ça s'arrange parce que je sais que ce ne sera jamais le cas...

Sélène s'arrêta le temps de reprendre son souffle et tourna la tête vers Éric, avant de rire d'un air navré.

-Je m'excuse, quand je commence à parler, je ne m'arrête plus. Vous me débarassez d'un casse-pied ivre et tout ce que je trouve à faire comme remerciment c'est de vous casser les oreilles avec mes histoires à la noix...

Elle se gratta la nuque, plus mal à l'aise que jamais. Étrangement, pendant son long et interminable discour, elle avait sentit l'attention du jeune homme sur elle, comme si ses paroles étaient vraiment intéressantes. Il l'avait écouté sans dire un mot, sans porter de jugement sur le fond de sa pensée, et la jeune femme avait apprécié cette marque de respect.

Mikael eu un triste sourire.

* C'est un sentiment unique que tout le monde partage... étrange *

Respirant profondéent, tentant d'alléger l'atmosphère, il reprit.

- Je ne connais qu'une seule solution à ça !

Et sans un mot, il tendit le paquet de pop corn à la jeune femme.

- Quand à votre soucis, c'est quelque chose qui se cogite. Vous devriez vous demander ou vous devriez être en ce moment, auprès de qui, sous quels traits...

Il sourit, écartant légèrement les bras.

- Et avec un peu de bol, vous ne vous découvrirez pas un côté vagabond comme moi, au risque de vous retrouver avec un chien et un paquet de pop corn, assis sur un mur en plein milieu de la nuit!

Etrangemment, il ne savait pas quoi faire pour réconforter la jeune femme. Il avait l'impression d'être totalement inexistant. Comme si lui, le véritable Mikael Senn, n'avait jamais existé, qu'il avait été rayé de la carte et de tous les esprits.

Elle prit une poignée de pop-corn et la dégusta conscientieusement.

-Je sais auprès de qui je veux être, là n'est pas le problème. C'est plus une question de pouvoir que de vouloir. Disons que le destin n'a pas été très clément de ce côté-là...

Sélène sourit finalement et haussa les épaules.

-Mais bon, comme vous le dites, c'est quelque chose qui se cogite. Peut-être que je devrais essayer de laisser aller les choses un peu au lieu de vouloir les faire avançer trop vite. Tout vient à point à qui sait attendre, comme dit le dicton.

Ses yeux brillants tels deux émeraudes croisèrent ceux du jeune homme.

-Je crois que vous vous sous-estimé beaucoup trop, Éric. Pour un type qui se dit vagabond par moment, vous êtes de très bon conseil. Et puis, qui sauverait les demoiselles en détresse et leur offrirait du pop-corn si vous n'étiez pas là ?

Elle rit doucement, heureuse d'avoir pût oublier l'espace d'un instant ses tracas. Plus les minutes passaient et plus son impression de connaître l'homme devant elle se confirmait. Ses geste, ses traits et sa façon de s'exprimer, tout lui semblait si famillier, sans qu'elle puisse dire comment et pourquoi.

Une petite brise s'éleva, parcourant la rue, rafraichissant l'air alourdi de l'été. Il sourit.

- Si vous le dites. Vous savez, vous n'êtes pas mal non plus dans le rôle de la jeune star modeste! Je ne sais pas combien de personnes prendraient la grosse tête à votre place, donc ne vous rabaissez pas non plus... Il ne faut jamais se laisser marcher dessus...

*et toujours rester soi même ...*

Mikael s'adossa au mur également, enlevant ses lunettes pour les frotter machinalement à un coin de sa chemise. Il se frotta également les yeux. Il n'arrivait pas à se faire à ces lentilles, et elle provoquait souvent des démangeaisons. Il vérifia qu'elles ne s'étaient pas décalés et remis à nouveau ses lunettes.
Il soupira doucement. Finalement, sa situation était assez dramatique. Un peu comme d'habitude, en fait, sauf que la, il n'était même plus tout à fait lui même.

- JE trouve que cette conversation fini un peu à la Freud...

Elle sourit, une idée lui ayant soudain traversé l'esprit.

-Pourquoi ne pas la continuer autour d'un casse-croûte alors ? Je connais un restaurant pas très loins d'ici qui fait les meilleures pâtisseries de la ville. En plus, le proprio' est un ami à moi, il acceptera sûrement que Polka se joigne à nous.

Sélène glissa ses mains dans ses poches, attendant une réponse. C'était tant par envie que par curiosité qu'elle avait fait cette demande. Certain aurait pût la voir comme une sorte de rencard, mais pour elle, ce n'était qu'une proposition comme les autres.

-C'est une idée comme ça, si vous refusez, je n'en serai pas vexée, croyez-moi. Je me disais seulement que c'était dommage de terminer la soirée sur une note aussi psychologiquement dramatique, sourit-elle à Éric.

Mikael eut un sourire en coin. Elle avait traduit sa pensée.

- Aucuns problèmes pour moi!

Il fit un geste vers la bête noire présente à ses pieds.

- Su...rtout si cette brave bête peut se joindre à nous.

Il se donna une gifle intérieure. Son coeur s'emballa, il le sentait battre à ses tempes. Lui qui avait peur que Sultane ne le trahisse, il avait failli se trahir lui même. Il n'aurait pas dû relacher sa vigilance. Il se calma en quelques secondes et poussa un soupir amusé.

- Allons noyer notre esprit dramatique dans des patisseries...

Il se détacha de son mur et secoua un peu ses pieds pour réveiller ses chevilles engourdies.

- et sinon, pourquoi vous vous êtes installée ici? C'est plutôt mal famé comme coin, et puis un ranch pour une personne qui a les moyens, il y en a partout, et des plus agréables que celui ci.

Se rendant compte d'une petite erreur, il rectifia sur sa lancée.

- ... enfin, à ce qu'on m'a dit.

Elle sourit, sachant que sa réponse serait probablement jugée ridicule.

-J'aime bien ce petit coin mal famé, comme vous dites. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, les habitants sont plutôt accueillants et il y a toujours quelque chose à faire. La première fois que je suis venus au Ranch, j'avais choisis cet endroit parce que c'était le seul que je pouvais m'offrir, mais maintenant, c'est plus une question de symbolisme. J'y aie vécus tant de chose que je me verrais mal aller ailleurs. C'est un peu comme ma maison ici.

Ils marchèrent quelques mètres à peine avant d'arriver devant le restaurant en question. Sélène poussa la porte, faisant résonner la cloche de l'entrée, et fouilla le petit commerce des yeux. Un homme s'avança vers eux, le sourire aux lèvres.

-Bonjour mademoiselle Waydan, que me vaut l'honneur de vous recevoir ici, à cette heure ?

Elle rit et fit un vague geste de la main.

-Disons seulement que j'avais un petit creux et que la simple idée de tes succulents petits gâteaux m'a mit l'eau à la bouche.

La jeune femme désigna Éric d'un signe de la tête et sourit.

-Tu pourrais nous préparer deux fondants au chocolat ?

-Je vais même te les offrir !

-T'es vraiment chic. Je penserai à toi quand viendra le temps d'acheter les cadeaux de Noël.

L'homme éclata de rire et retourna à sa cuisine. Sélène prit place à une table pour deux et fit signe au jeune homme de la rejoindre.

-J'espère que vous n'êtes pas diabétique parce que les desserts ici sont diablement sucré. C'en est presque un crime.

Mikael suivit la jeune femme, observant les environs par automatisme. Une entrée principale, une sortie de secours dans le fond de la salle. Une dizaine de personnes quand même.

- Pas de problèmes, je me suis bien enfourné 2 paquets de pop corn dans la soirée, un fondant ne me fait pas peur.

Il eu un petit sourire avant d'ordonner à Polka de venir s'asseoir juste entre lui et le mur, de façon à ce qu'elle ne gène pas le passage, ou qu'elle ne soit pas tenté par les autres assiettes ... Sultane ne l'aurait pas été, Polka devait l'être.

- Vous semblez être une habituée d'ici, vous ne l'êtes pas devenue, diabétique?

Il flatta du bout des doigts les oreilles de Sultane qui dépassaient juste au dessus de la table.

- Ah, et puis, je suppose que vous pouvez me tutoyer.

-Vas pour le tutoyement. En ce qui concerne le diabétisme, non, heureusement, je n'en suis pas atteinte. Si c'était le cas, je crois que je mourrais de ne pas pouvoir savourer les délices de ce restaurant. Tiens, parlant de délices, je crois que nos assiettes sont prêtes.

Et comme de fait, le propriétaire en personne vint déposer sur leur table deux fondants au chocolat nappé d'un soupçon de crème glacée. Il les salua d'un grand sourire et, après leur avoir souhaiter un bon appétit, disparut parmis les serveurs.

Sélène prit un petit morceau de chocolat et le glissa entre les lèvres, avant de sourire d'un air satisfait.

-Dis-moi, est-ce la façon dont je me suis adressé au propriétaire ou simplement mon tour de taille qui te fait croire que je suis une habituée de ce restaurant ? Je te préviens, une mauvaise réponse pourrait...

Elle s'interrompit brusquement, les sourcils fronçés. Une jeune homme venait de faire son entrée, cherchant visiblement quelqu'un. Elle reconnût rapidement Mike, et lui aussi ne tarda pas à la reconnaître. Il se dirigea vers leur table d'un pas visiblement mécontent qui ne laissait pas place au doute : Il n'était pas là pour une petite visite de courtoisie.

Mikael glissa lui aussi un morceau de chocolat entre ses lèvres, en savourant le gout. Il n'était pas du genre à manger du chocolat à la louche, mais il aimait en déguster de temps à autre. Etonné par l'arrêt brutal de la jeune femme dans sa conversation, il leva les yeux ... et rencontra ceux, furieux, de Mike. La surprise lui provoqua une quinte de toux. Le chocolat avait visiblement prévu une autre destination que celle recommandée. Il but une gorgée d'eau et l'iritation s'estompa. Sultane avait brsquement relevé les yeux vers Mike et agitait la queue.

* et merde ... *

Jugeant qu'il n'était pas nécessaire de s'attarder sur cette situation, Mikael se leva, fouillant sa poche à la recherche de son porte feuille.

- ... Je vais payer

Sans attendre une quelconque réplique de la jeune femme, il se dirigea vers le comptoir, suivi par Mike. Il demanda rapidement l'addition au gérant avant de se tourner vers Mike, faisant attention à tourner le dos à Sélène.

- ça fait longtemps, Mike

- Qu'est-ce que tu fous la, bon dieu! Tu sais bien que tu devais plus réapparaitre dans ce coin!

- Ne t'inquiète pas...

Il pianota d'un stacato nerveux la surface lustrée du comptoire.

- Ne pas m'inquiéter? Tu es sensé être mort, Mikael! Et si quelqu'un découvrait qui tu étais, ce serait assez alarmant, pour toi comme pour toute l'entreprise.

Mikael soupira.

- Sélène est au courant de l'existence de l'entreprise et de nos postes, ce n'est donc pas un problème!

Mike se tut un instant, semblant cogiter cet argument nouveau.

- et tu comptes lui attirer de nouveaux ennuis?

Mikael se raidit, fusillant du regard le visage triomphateur de Mike. Il avait trouvé le point sensible.

- Je prends pas de risques, j'ai tout contrôlé, je n'ai parler à personne d'autre.

- Appart à ce géant auquel tu as adressé ta plus belle droite?

Mikael poussa un long soupir, cherchant le mot le plus adapté pour résumé la situation.

- Connard.

Mike le regarda d'un air amusé.

- C'est trop facile, tu régresse, Mikael.

Le gérant revint alors en présentant le prix, Mikael régla le tout avant de se détourner de son second, et de retourner à la table ou Sélène était assise. Mike s'en approcha également.

- Mademoiselle Waydan, si j'étais ici, c'était pour vous conseiller de ne plus sortir sans protection, et de ne pas cotoyer des personnes étrangères...

Nouveau regard éloquent vers Mikael.

Elle regard tour à tour Mike et Éric, quelque perdue dans cette situation des plus étranges.

-Tiens, vous vous connaissez tous les deux ? Copains de bureau, je paris. Eh bien dites donc, c'est à croire que vous êtes partout.

Sélène savoura une nouvelle bouchée de fondant, laissant planer un silence inconfortable sur la petite assemblée.

-Sauf votre respect, je crois être en âge de décider si je peux ou non sortir sans protection, comme vous dites,répondit-elle finalement à Mike, l'air parfaitement sérieux.Pour ce qui des personnes étrangères, probablement une subtile allusion à Éric ici présent, je crois que lorsque quelqu'un vous sauve la vie, il devient évident que ce n'est pas un maniaque qui veut vous faire sauter la tête. Merci quand même de la suggestion,termina t-elle sans une pointe de sarcasme ou d'arrogance.

Son regard croisa celui du propriétaire qui semblait plutôt mal à l'aise, voir inquiet, avec l'arrivé des deux jeunes hommes autour de sa table. Elle lui adressa un sourire se voulant rassurant et reporta son attention sur ses compagnons.

-J'imagine que vous n'êtes pas seulement venût ici pour me dire ce que je sais déjà, n'est-ce pas Mike ?

Mikael ouvrit de grands yeux, surpris par le changement de comportement Sélène. Il ne put s'empêcher de tourner vers Mike un regard sarcastiquement interrogateur et un mince sourire s'étirant sur ses lèvres. Il n'aurait pas mieux dit.
Mike resta muet un instant, surpris, avant de la regarder avec un sourire ironique.

- Bien sûr, mais vous avez tendance à vous attacher rapidement, même à des personnes peu recommandable, et s'il s'avère que vous tombez à nouveau sur une personne comme Mikael, elle pourrait bien vous attirer des ennuis, même si l'envie nous tente de lui greffer une auréole ... me tromperais-je?

Mikael resta muet, il était Eric. Il jeta un regard curieux vers Sélène, comme pour l'interroger sur l'identité de ce Mikael visiblement peu recommandable. Sultane avait dressé les oreilles à ce prénom qu'elle aimait tant, Mikael baissa les yeux vers elle et lui flatta le bout du museau. L'atmosphère s'était tendue, mais il s'appliquait dans son rôle d'étranger ne comprennant pas grand chose à cette histoire. Il mangea à nouveau un morceau de chocolat, veillant à ce que celui ci ne tente pas de se rebeller comme son prédécésseur.

Sélène fusilla Mike du regard, piquée à vif par sa réplique. Elle joua un moment avec sa cuillère, cherchant les mots pouvant décrire au mieux ce qu'elle souhaitait dire.

-Si j'étais du genre à juger sans savoir de quoi il en retourne, comme vous, je dirais que les gens avec un coeur aussi froid et dur que le votre ne peuvent pas comprendre ce qu'est l'affection, mais comme tel n'est pas le cas, sachez tout simplement que je ne regrette rien et que de toute façon, ce ne sont pas de vos affaires. Quand j'aurai besoin de quelqu'un pour me faire la moral, j'appelerai mon père.

Elle prit un morceau de fondant et ouvrit la bouche pour l'engloutir mais s'arrêta au dernier moment et la déposa dans son assiette.

-Vous savez ce que je me dis en ce moment ?Poursuivit t-elle. Je me dis que Mikael aurait dût recevoir la médaille de bravoure pour vous avoir enduré tant d'année. Non mais c'est vrai, pourquoi êtes vous aussi amer et cynique ? Vos parents ne vous ont jamais laissé manger de sucre quand vous étiez enfant et ça vous a marqué au point où vous refusez de voir le bonheur ? Pour votre information, tout n'est pas noir. La peut s'avérer meilleure que ce que l'on croit si on lui laisse une chance.

Mikael jeta un regard agréablement surpris vers Sélène. Un regard presque reconnaissant, en fait. Lui ne pouvait rien dire, et Mike semblait profiter de la situation pour, en plus, l'attaquer sur son point faible, soit Sélène.

* C'est lâche, ça, Mike ...*

Le jeuen homme s'attendait à ce qu'il lache prise suite à ce revers de Sélène, mais il reprit de plus belle.

- La vie? il rit. Vous devriez dire ça à Mikael, et on verra qui sera cynique alors. Quand à votre médaille, je doute que cela ne l'importe, la ou il est. Et n'essayez pas de me dire qu'il est encore en vie, comme cet espoir qui reluit dans vos yeux dès que l'on parle de lui. En 3 mois, il ne vous a fait aucun signes, laissés aucuns messages, comment pouvez vous vous imaginer qu'il s'en est sortit? Alors que vous avez entendu comme moi les chirurgiens, les infirmiers, et les bruits des machines?

Il planta son regard droit dans les yeux de Sélène se penchant même légèrement vers elle.

- Jusqu'a preuve du contraire, on ne peut pas survivre à 50 secondes d'arrêt du coeur, mademoiselle Waydan.

Mikael se râcka la gorge assez bruyamment, faisant comprendre aux deux "boxeurs", que pas mal de monde les regardaient dans le restaurant. Mikael regardait avec inquiétude la jeune femme assise en face de lui. Il ne voulait pas qu'elle s'inquiète pour lui comme Mike semblait le soupçonner. S'il avait disparu, c'était pour ne plus lui attirer d'ennuis, pas pour qu'elle l'attende indéfiniment. Il avait espéré qu'elle refasse sa vie lorsqu'il reviendrait la voir, ce dont-il n'était pas encore sûr. Mais le fait qu'elle prenne ainsi sa défense ne laissait rien penser dans ce sens. Pourtant, il ne pouvait nier que retrouver Sélène comme elle était avant était un soulagement.